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Nicolas, « prisonnier politique » : vous plaisantez ?

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À l’heure où nous parlons, près de 15 000 internautes ont apporté leur soutien à Nicolas, le jeune manifestant anti-mariage pour tous aujourd’hui auréolé du galvanisant statut de « prisonnier politique ». Prisonnier politique, vous avez dit ? Genre, comme, de leurs temps, Louise Michel et les communards ?

Nicolas, c’est l’histoire d’un jeune homme originaire d’Angers, installé à Paris pour ses études de sciences politiques et d’histoire, à la Catho. Mercredi 19 juin, le garçon a priori bien sous tous rapports a été condamné à 4 mois de prison dont 2 fermes, ainsi que 1000 euros d’amende pour manifestation non autorisée et rébellion. En effet, le jeune manifestant avait participé à un attroupement devant le siège de la chaine de télévision M6, un happening visant à perturber l’émission « Capital » dans laquelle François Hollande devait intervenir. Dans la foulée, la meute avait paradé dans le quartier, toujours dans l’illégalité.

En qualifiant Nicolas de « prisonnier politique », la droite se trompe volontairement de débat : au lieu d’exiger l’abrogation des lois liberticides passées sous Sarkozy, elle hurle à la supercherie revancharde de la gauche. Une atterrante stratégie, elle pour le coup, réellement « politique ».

"Nicolas, prisonnier politique"

Manif pour tous… mais surtout pas justice pour tous

Comportement dangereux, faits accablants, flagrant délit : Nicolas a subi la procédure de citation directe, conformément à ce que prévoit la loi lorsqu’un délinquant est pris sur le fait. L’histoire pourrait s’arrêter là tant elle doit être anodine dans les tiroirs de la justice, mais la droite orgueilleuse en a décidé autrement. Nicolas est devenu un martyr. Le symbole d’une opinion publique bâillonnée, l’allégorie de la liberté outragée, l’emblème d’une France offensée.

Or, ce que l’on ne dit pas assez au milieu des jacasseries d’élus UMP indignés par le sort de Nicolas, c’est que s’il y a bien une chose qui a permis cette condamnation (lourde ou justifiée, vous l’aurez compris, ce n’est que la partie submergée de l’iceberg), c’est justement la politique pénale instaurée… sous Nicolas Sarkozy.

Sur son blog Derrière le barreau, l’avocate Laure Heinich-Luijer ne manque pas de noter, à très juste titre, l’ironie de la situation :

« Fière en son temps de brandir le nombre croissant d’interpellations, on pourrait croire que la droite se réjouirait de ce cas exemplaire : infraction-arrestation-sanction. Mais théoricienne du complot, elle préfère dénoncer ‘les harcèlements arbitraires des forces de l’ordre dont seraient victimes les manifestants contre la loi Taubira’. »

Car, au fond, la question est-elle entière si l’on se contente de regretter que la justice ait eu « la main lourde » au lieu de se demander ce qui, dans son fonctionnement-même, lui a permis d’avoir cette fameuse main lourde (sic) ? Tout de suite plus dur à assumer intellectuellement pour la culture du bipartisme.

En attendant, l’argument racial

Alors au lieu de condamner les lois liberticides que leurs prédécesseurs ont mis en place, les élus UMP préfèrent jouer l’éternelle partition de la droite sécuritaire : comparer leur bon gendre de Nicolas avec les « racailles », cette entité Léviathan menaçant la République depuis son intérieur. Ainsi, pour Bruno Retailleau (élu UMP en Vendée et proche de Philippe de Villiers), l’affaire Nicolas est aussi le moyen de parler des « voyous du RER D » pendant que David-Xavier Weiss (secrétaire national UMP) évoque « Mohammed ».

Ce choix de dialectique trahit une chose : le problème qu’ont ces personnalités de droite, c’est bel et bien le fait que Nicolas n’a pas « le physique de l’emploi ». Blanc, bourgeois, étudiant dans une grande école. Ça change des immigrés deuxième génération et invétérés fumeurs de joints dans le hall d’immeuble du bloc C d’une cité HLM de Boulogne-Billancourt. Forcément, c’est déroutant.

Répétons-le : Nicolas n’est pas un « prisonnier politique ». Il n’a pas été condamné pour ses idées. Il a été arrêté pour refus d’obtempérer lors d’un prélèvement obligatoire d’ADN.

En réalité, si l’arrestation de Nicolas pose problème à qui que ce soit, ce n’est pas un « acte politique » émanant de la gauche qu’il faudrait dénoncer, mais bien les lois scélérates de Nicolas (l’autre) qui ont fait la promotion des systématiques prélèvements d’ADN et comparutions immédiates. Pour remettre les choses dans leur contexte.

Cet article Nicolas, « prisonnier politique » : vous plaisantez ? est apparu en premier sur Pensées Plastiques.


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